Retraites complémentaires : l’exécutif lorgne jusqu’à 3 milliards d’euros du « magot » de l’Agirc-Arrco

Le ministre du travail, Olivier Dussopt, lors de la Rencontre des entrepreneurs de France, à l’hippodrome de Longchamp, à Paris, le 28 août 2023.

La pression s’accentue sur les partenaires sociaux. Alors que les syndicats et le patronat négocient, depuis la mi-juillet, un nouvel accord sur l’Agirc-Arrco – la caisse de retraites complémentaires du privé –, le gouvernement évoque, de manière de plus en plus insistante, l’hypothèse selon laquelle l’Etat ponctionnera les ressources du régime. D’après Sophie Binet, la secrétaire générale de la CGT, cette piste a été abordée, lundi matin, par Olivier Dussopt, le ministre du travail, avec qui elle s’est entretenue rue de Grenelle.

L’exécutif envisage une contribution de l’Agirc-Arrco qui pourrait se situer, à terme, dans une fourchette comprise entre 1 milliard et 3 milliards d’euros par an, si aucune mesure n’est prise pour participer au financement des petites pensions à l’issue des négociations en cours entre partenaires sociaux, rapporte Mme Binet. L’entourage de M. Dussopt, lui, ne commente pas.

Une telle idée n’a rien de surprenant. Elle était apparue, d’abord discrètement, durant l’automne 2022, lors de l’élaboration de la réforme des retraites. Après la promulgation, le 14 avril, de la loi qui a reporté à 64 ans l’âge légal de départ, le pouvoir en place est revenu à la charge, sur un ton plus direct : son souhait était – et reste – que l’Agirc-Arrco fasse un geste en faveur des petites pensions, l’un des buts de la réforme étant de porter celles-ci à 85 % du smic pour une personne ayant une carrière complète.

« Scandaleux et inacceptable »

Le régime affiche, en effet, une santé éclatante, avec un excédent de 5,1 milliards d’euros en 2022. Ses réserves financières, accumulées au fil des ans, s’élevaient à près de 69 milliards à la fin décembre. Un « trésor » qui pourrait croître et embellir, avec la réforme du 14 avril : la règle des 64 ans a pour effet de diminuer les dépenses de pensions et d’accroître les ressources (les travailleurs cotisant plus longtemps du fait de l’allongement de leur carrière).

En dehors de Mme Binet, d’autres responsables syndicaux avaient eu vent des scénarios imaginés par l’exécutif. Mais ils ne portaient pas sur des montants aussi élevés. Secrétaire confédéral de Force ouvrière, Michel Beaugas explique que ses interlocuteurs gouvernementaux avaient parlé d’un effort de l’ordre d’un milliard d’euros par an. L’une des modalités à l’étude consisterait pour l’Etat à ne plus compenser intégralement les allègements de cotisations destinées à l’Agirc-Arrco.

L’idée de soutirer de l’argent au régime révolte plusieurs organisations de salariés. « C’est scandaleux et inacceptable », confie Mme Binet. Si les comptes de l’Agirc-Arrco sont largement dans le vert, ajoute-t-elle, c’est, pour l’essentiel, le fruit de décisions antérieures prises par des organisations d’employeurs et de salariés – « que la CGT n’avait pas cautionnées, d’ailleurs, car elles avaient réduit les droits au nom de la résorption des déficits ». « Aujourd’hui, poursuit Mme Binet, il n’est pas possible de ne pas renvoyer l’ascenseur aux salariés et aux retraités, si la situation financière s’améliore à la suite des sacrifices qui leur avaient été imposés il y a quelques années. » Si le gouvernement met sa menace à exécution, cela risque d’empêcher le financement de nouveaux droits, notamment pour tenir compte « des années d’études et des carrières hachées ».

Il vous reste 22.21% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.

Lien source : Retraites complémentaires : l’exécutif lorgne jusqu’à 3 milliards d’euros du « magot » de l’Agirc-Arrco

Demander un exemple de rapport

Nous vous répondrons dans les plus brefs délais.