En Iran, les hommes enfin solidaires des femmes qui refusent de porter le voile

Dans le nord de Téhéran, le 17 mars 2023.

Pendant des années, Mahnaz (un pseudonyme, comme toutes les autres personnes citées dans cet article), une graphiste iranienne de 35 ans, a essayé de s’habituer aux regards réprobateurs des hommes dans la rue, du fait de son foulard, perçu comme pas assez couvrant. Elle s’était résignée à l’idée qu’il n’y avait rien à attendre de ses compatriotes masculins. Mais depuis le début du soulèvement qui secoue l’Iran à la suite de la mort de Mahsa (Jina) Amini, en septembre 2022, pour un voile « mal ajusté », quelque chose de profond a changé dans l’attitude des hommes, affirment Mahnaz et d’autres Iraniennes consultées par Le Monde.

Alors que depuis septembre, de plus en plus de femmes sortent dans la rue les cheveux au vent, la trentenaire dit subir beaucoup moins de commentaires déplaisants de la part des hommes. A la place, « ils me sourient et me remercient pour mon courage », explique Mahnaz. « Une fois, j’étais assise sans foulard sur une banquette au centre de Téhéran. Un homme m’a lancé : “Je vous félicite d’être si belle sans ce maudit hidjab. Merci !” »

La manière dont les hommes manifestent leur soutien aux femmes qui osent défier la République islamique et l’obligation du port du voile, principe central du régime de Téhéran, va d’ailleurs au-delà des sourires et des paroles encourageantes. « Une fois, dans un Snapp (la version iranienne d’Uber), j’ai demandé au chauffeur s’il préférait que je remette mon foulard », se souvient Mahnaz qui cherchait ainsi à protéger le conducteur d’une amende et de poursuites judiciaires, ce à quoi s’exposent les propriétaires des véhicules dans lesquels se trouve une femme sans voile. « Le chauffeur, poursuit Mahnaz, m’a répondu : “Absolument pas. Ils peuvent m’envoyer tout ce qu’ils veulent. Vous, les femmes, vous payez le prix de la liberté avec vos vies. Moi, je peux payer une amende. Ce n’est pas grave.” » Depuis septembre 2022, au moins 525 civils ont été tués en lien avec la contestation, inédite dans son intensité et son étendue.

« Au début, j’avais peur »

Ces derniers mois, la police des mœurs, chargée de surveiller la tenue des hommes et des femmes, a disparu des rues et des places iraniennes. Les autorités essayent d’étouffer la révolte des femmes par des moyens détournés, notamment en dressant les gens les uns contre les autres. De plus en plus d’hôtels, de commerces et de restaurants ont été obligés de baisser rideau parce qu’ils ont accueilli des clientes sans voile. Fin février, les pharmacies ont reçu l’ordre d’obliger leurs employées à se couvrir leurs cheveux d’un « maghnaé », une sorte de cagoule, encore plus stricte que le foulard. Des Iraniens indignés par cette injonction, ont lancé une campagne de solidarité avec les Iraniennes en se faisant photographier, parfois dans les pharmacies, avec une cagoule sur la tête.

Il vous reste 53.32% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.

Lien source : En Iran, les hommes enfin solidaires des femmes qui refusent de porter le voile

Demander un exemple de rapport

Nous vous répondrons dans les plus brefs délais.