Attention, toxique ! Comment l’aposématisme du batracien est apparue

Courante en Europe, la salamandre tachetée avertit par sa couleur que sa peau sécrète un mucus empoisonné.

Etre ou ne pas être mangé, là est la question. Pour bien des animaux, le seul spectre qui vaille est celui de leur prédateur. Et comme tout dialogue avec lui s’avère impossible, la nature a offert aux proies différentes stratégies. La fuite, bien sûr, mais encore faut-il en avoir le temps. Le camouflage, ensuite, disparaître dans le décor. Ou alors imiter un élément non comestible – une branche, une feuille, ce que les biologistes nomment du doux nom de mascarade. D’autres espèces choisissent plutôt le mimétisme : prendre l’apparence d’un autre animal, dangereux, pour repousser les prédateurs. Des papillons de nuit se font ainsi passer pour des guêpes, des pieuvres pour des serpents marins…

Une de stratégies les plus fascinantes est sans doute l’aposématisme. Suggérée par Alfred Wallace (1823-1913) à Charles Darwin (1809-1882) dans leur correspondance au sujet des chenilles et des frelons, elle consiste pour une espèce à disposer d’une substance toxique et à le signaler aussi clairement que possible en arborant un signal à destination des prédateurs. Typiquement, une couleur vive. Insectes, mammifères, reptiles, mollusques, amphibiens : un peu partout dans le royaume du vivant, ce mode de défense s’est trouvé des adeptes.

Depuis des décennies, pourtant, il pose aux biologistes une énigme : son apparition. Pour qu’un signal soit rentable, il doit avoir été précédé, dans son évolution, de la présence de la substance toxique. Avant que celle-ci n’apparaisse, la meilleure stratégie reste donc le camouflage. Jusque-là, tout le monde est d’accord. Mais ensuite, comment une espèce cryptique devient-elle aposématique ? « Cela semble un mystère, explique Tom Sherratt, professeur de biologie à l’université Carleton d’Ottawa (Canada). Les premiers mutants visibles d’une espèce cryptique devraient être rapidement détectés par les prédateurs et pas aussi facilement reconnus comme toxiques. » Tués par erreur, en somme, tels Polonius par Hamlet, faute pour les prédateurs d’avoir eu le temps d’apprendre le rôle d’avertisseur du signal coloré. Dès lors, comment cette propriété a-t-elle pu se répandre ?

Un stade intermédiaire

Dans un article publié vendredi 17 mars dans la revue Science, l’équipe de Tom Sherratt expose un scénario. Les espèces aposématiques seraient passées par un stade intermédiaire dans lequel elles disposent de signaux vifs mais la plupart du temps cachés. De telles espèces existent dans la nature : les papillons de nuit Catocala, avec leurs ailes antérieures cryptiques et leurs ailes postérieures vives. Ou encore différents amphibiens, qui cachent leurs couleurs vives sur leur ventre et ne les montrent qu’en cas de danger.

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